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Idéologie

La guerre civile qui vient…

Une des stratégies du Capital pour perpétuer sa domination est de dissoudre la lutte des travailleurs organisés dans une guerre généralisée de tous contre tous (guerre des sexes, guerre des races, ou encore guerre des civilisations).

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Par Loïc Chaigneau

Lecture 10 min

« Le Capital amènera la guerre civile chez les pauvres. »

Je n’ai eu de cesse ces derniers mois de rappeler cette phrase de Michel Clouscard. Et pour cause, elle décrit de la manière la plus synthétique qui soit l’actualité à laquelle nous devons ou allons devoir faire face. En effet, nous constatons que la guerre civile idéologique est déjà en place et elle n’est que le premier pas vers une guerre horizontale véritable qui pourrait se présenter si nous n’y prenons pas garde.

I – De quel grand remplacement parlons-nous ?

Après les attentats de Charlie Hebdo du 07 Janvier 2015, la théorie dite du « grand remplacement », introduite par Renaud Camus et véhiculée entre autre par Eric Zemmour (1) et l’ensemble de la droite réactionnaire, semble a priori plus que jamais d’actualité. Cette théorie tend à montrer que l’immigration massive conduit inévitablement à un grand remplacement de population et à une islamisation conséquente de la France, qui serait « détournée d’elle-même ». En résumé, de plus en plus d’immigration d’origine africaine conduirait à terme à détruire la France et « ses racines européennes ». Cette théorie qui analyse peu les origines historiques d’un tel processus, puisqu’elle est soutenue par des théoriciens schizophrènes qui ne peuvent lutter contre le capitalisme qu’ils défendent (le « capitalisme à papa », mort depuis 50 ans bientôt pourtant) sans comprendre que cette logique d’immigration sert dans le même temps les intérêts du Capital, contre l’ensemble des classes populaires, issues ou non de l’immigration. C’est une analyse classique qui tend à mettre en avant les rapports et luttes ethniques plutôt que de s’intéresser aux causes économiques et sociales. Maurice Bardèche, précurseur de cette théorie, écrivait d’ailleurs en 1960 : « La race blanche ne luttera plus pour sa prédominance économique ou politique, elle luttera pour sa survie biologique. […] Demain, ce ne sont plus les prolétaires et les capitalistes qui se disputeront les richesses du monde, ce sont les Blancs, prolétaires et capitalistes unis, qui auront à se défendre, eux, race minoritaire, contre l’invasion planétaire ».

Or, en réalité, le Capital se moque des identités, couleurs de peau ou religions. De fait, « quand il s’agît d’argent, tout le monde est de la même religion » disait Voltaire – prémisse de la doctrine libérale axiologiquement neutre qui prétend évacuer toute question éthique et sociale en plaçant l’argent au centre des relations. Le Capital préfèrera toujours négocier avec un riche industriel africain qu’avec un prolétaire français. La lecture de Bardèche est donc une lecture faussée qui ne tient pas compte de la réalité historique et des processus capitalistes.

En effet, Marx le premier a très bien montré quel était l’intérêt du Capital dans l’immigration. (Cf. immigration en Irlande – Le Capital). Plus tard, lors des « trente honteuses », c’est aussi le Capital qui a eu recours à l’immigration de masse. Il y trouve en effet deux intérêts principaux que je vais tenter d’exposer ici :

II – De l’utilité de la guerre ethnique

Lothrop Stoddard, fondateur du concept de sous-homme et eugéniste, qui proposa une classification hiérarchique des races humaines à l’intérieur de laquelle il incluait en dernière instance les « socialistes blancs occidentaux », avouait déjà sans véritablement s’en rendre compte que dans son idéologie ce n’était pas tant la couleur qui était déterminante, mais les rapports de classe. De la même manière, il n’est pas rare aujourd’hui d’entendre des diatribes identitaires de personnages qui finalement n’hésitent pas à faire alliance avec des ethnies différentes selon leur origine de classe ou leur idéologie commune. Leur pratique invalide leur théorie. D’autres, à la manière de Stoddard, nous expliquent encore que la violence des immigrés de banlieues (toute relative soit elle) proviendrait de leur frustration sexuelle, due à leur pauvreté économique et sociale, avant de conclure, sans s’être aperçu de leur analyse préalable, que tout cela vient en fait soit de leur race, de leur ethnie ou leur religion. Nous voyons d’ores et déjà l’escroquerie que constituent alors ces thèses qui s’invalident elles-mêmes et se contredisent. Leur pensée, si tant est qu’il y en ait seulement une, s’annule en même temps qu’elle se produit, du fait des compromissions qu’ils sont prêts à faire pour que l’ensemble de leur représentation du monde cadre dans leur idéologie.

En réalité, ces thèses constituent un fabuleux outil de diversion intellectuelle et politique. Il n’est pas besoin ici de dresser le constat plus qu’affligeant et unanimement perçu aujourd’hui des politiques menées en France, mais aussi en Europe et qui conduisent à une paupérisation constante de la majorité des peuples, tandis que la classe capitaliste ne cesse de s’enrichir.

Le capitalisme vit actuellement sa crise la plus profonde. Une crise tout à la fois économique et politique mais aussi une crise du sens, qui conduit à une perte de repères. Tout l’entraîne au regard des processus logiques que Marx a très bien décrit, vers sa chute à court terme sur l’échelle historique. À l’heure où le capitalisme est prêt à s’effondrer et où il nous faudrait saisir cet instant pour le renverser et le dépasser, son unique moyen de survie est la guerre. Ce fût déjà le cas lors de la crise de 29, même si le capitalisme n’était pas à un stade si avancé et donc moins proche de sa fin. Le grand Capital n’a pas hésité à avoir recours au fascisme et à la guerre pour organiser un conflit identitaire et horizontal. Cette mise en route de la guerre s’est inscrite sur un temps long et progressif qui a débuté lui aussi par une guerre civile idéologique et une propagande massive. Néanmoins, c’est ce temps long qui peut aussi nous faire garder espoir aujourd’hui si nous sommes à même de déjouer les pièges qui nous sont tendus.

Dans le même temps, aujourd’hui, nous assistons à un assassinat en règle de la philosophie et des sciences sociales qui, lorsqu’elles ne sont tout simplement pas exclues de la sphère politique et remplacées par un vide que la télévision, entre autres, vient combler, avancent toujours dans l’ombre de la grande « déconstruction » menée par les dit philosophes de la « French Theory ». Ces derniers n’ont eu de cesse de déconstruire les esprits pour y faire régner un véritable chaos allant d’Althusser, qui a vidé le marxisme de son essence, et de l’hégélianisme à Judith Butler, principale théoricienne du genre, en passant par Michel Foucault dont nous avons déjà parlé plus tôt et d’autres encore qui n’ont vu de producteur que le désir.

Un corps social en décomposition. Des esprits vides. Un PCF abattu et traître (pour ce qui est de ses cadres). Une mise en avant à gauche des « déconstructeurs », à droite de la mouvance réactionnaire et pétainiste.

A tout cela, il ne manquait plus que d’introduire un bouc-émissaire, décrit comme « ennemi de l’intérieur », seul rempart pour une unification potentielle de ce qui reste de la Nation. La lutte ethnique vole donc au secours du Capital, incitant à la guerre civile idéologique puis armée dans les couches moyennes et populaires.

III – Le djihad unificateur…

Puisqu’il est nécessaire de le rappeler, je m’empresse de dire avant de poursuivre mon propos que je condamne, sans aucune réserve, les attentats du Charlie Hebdo qui ont eu lieu en Janvier 2015. Ceci étant dit, outre l’émotion, venons-en aux faits.

Pour cela, il nous faut d’abord nous rappeler d’un temps où l’Occident, et principalement les Etats-Unis, avait tout intérêt à s’allier avec les moudjahidins, ces combattants du djihad. Ce temps, était celui de la Guerre Froide et des années 1970. C’était celui où Ben Laden posait aux côtés de Zbigniew Brzezinski (2).

C’est pourquoi Hillary Clinton a justement rappelé devant le Congrès en Janvier 2013 : « Souvenons-nous que les gens contre qui nous nous battons aujourd’hui, nous les avons créés il y a 20 ans. » Et d’ajouter : « Nous l’avons fait pour faire face aux Soviétiques qui avaient envahi l’Afghanistan de peur qu’ils ne dominent l’Asie centrale. A l’époque, on disait que ce n’était pas un mauvais investissement puisqu’on en avait fini avec l’Union soviétique. Mais soyons prudents avec ce qu’on a semé parce que nous allons le récolter. […] Nous avons dit aux militaires pakistanais, débrouillez-vous avec les missiles (sol-air) Stringer qu’on a laissés un peu partout dans votre pays et les mines disséminées tout au long de la frontière. Nous avons donc arrêté et traité avec l’armée pakistanaise et l’ISIS . Et nous devons maintenant compenser tout ce temps perdu ».

Depuis, cela a continué et l’Occident n’a eu de cesse de financer les islamistes radicaux afin non plus de lutter contre l’URSS, mais de déstabiliser le Moyen-Orient. Ainsi, les régimes laïcs et autrefois amis de Kadhafi ou Saddam, aujourd’hui d’Al Assad, ont été ou sont en passe d’être renversés. Lorsque le djihad agit en Afrique et au Moyen-Orient dans les intérêts de l’Occident, les médias mainstream les nomment « rebelles », lorsqu’il agit sur les territoires Occidentaux, ils les nomment « terroristes ». Comprenez bien que ce sont les mêmes. Comme l’avait très bien dit Hillary Clinton, les États Occidentaux ne récoltent donc aujourd’hui que ce qu’ils ont semé.

Les analyses qui tendent à démentir le fait que ces attentats aient été perpétués sous faux drapeaux et sans lien avec l’islamisme radical me semblent alors erronées. La question qui peut en revanche être recevable est celle de savoir si le gouvernement français, prévenu par les services secrets algériens, deux jours avant, n’étaient pas en mesure de stopper cet attentat, et si oui, quels sont alors ses intérêts ? Nous entrons ici dans la spéculation la plus totale, qui revêt une part de légitimité du fait des incohérences que nous pouvons constater, mais je m’emploierai ici à éviter toute spéculation abusive qui est un non-sens et va à l’encontre du travail journalistique. Il me semble bien plus évident en effet, et même utile, que ces attentats ont été perpétrés par des membres du djihad ou d’une filière similaire. Ce qu’il est important de comprendre, c’est que s’ils ont pu le faire et s’ils ont eu les moyens techniques et logistiques, c’est parce que nos gouvernements Occidentaux leur en ont donné les moyens en les finançant et en les armant dans leur guerre contre la Syrie aujourd’hui et avant en Lybie, en Iran ou même au Mali.

Nous constatons donc deux choses :

« Ils la veulent tous cette guerre … La haine n’entrera pas dans mon cœur… Je me trouve seul, exclu de cette communion sanglante. »
Romain Rolland, 1914


Notes :

(1) Certains diront d’Eric Zemmour, contre qui je n’ai rien en tant qu’homme, qu’il ne souhaite pas la guerre civile mais qu’il en fait lui aussi le constat. Or, sans doute qu’à titre personnel cela ne sert pas forcement ses intérêts mais ses analyses servent la mise en place d’une guerre civile d’abord idéologique… la guerre civile idéologique n’étant pas la guerre des idées, qui ne serait qu’une dispute au sens noble, mais bien l’instrumentalisation des idées qui conduit à la guerre.
(2) Artisan majeur de la politique internationale des USA. Conseiller de nombreux présidents américain et auteur du livre, le Grand échiquier.
(3) Interview de Dominique de Villepin à BFM, le “terrorisme islamique” a été créé par les occidentaux.
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